Code canadien du travail, Parties I, II et III

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Motifs de décision

Conférence ferroviaire de Teamsters Canada,

plaignante,

et

Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique,

intimée.

Dossier du Conseil : 30947-C

Référence neutre : 2015 CCRI 783

Le 31 juillet 2015

Le Conseil canadien des relations industrielles (le Conseil) était composé de MGinette Brazeau, Présidente, ainsi que de Me Richard Brabander et M. Norman Rivard, Membres.

Procureurs inscrits au dossier

Me Denis Ellickson, pour la Conférence ferroviaire de Teamsters Canada;

Me Nizam Hasham, pour la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique.

Les présents motifs de décision ont été rédigés par Me Ginette Brazeau, Présidente.

I. Nature de la demande

[1] Le 25 février 2015, la Conférence ferroviaire de Teamsters Canada (la CFTC ou le syndicat) a déposé une plainte de pratique déloyale de travail dans laquelle elle allègue que la Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CP Rail ou l’employeur) a enfreint le paragraphe 8(1), les articles 50 et 89 ainsi que les alinéas 94(1)a) et 94(3)a), b) et e) du Code canadien du travail (Partie I – Relations du travail) (le Code). Le syndicat allègue que l’employeur ne respecte pas le protocole de retour au travail intervenu entre les parties lorsque celles-ci ont convenu de soumettre à l’arbitrage exécutoire leur différend découlant des négociations collectives, conformément à l’article 79 du Code. Plus précisément, le syndicat prétend que la décision unilatérale de l’employeur d’imposer la façon dont les congés pour affaires syndicales seraient accordés va à l’encontre du statu quo qui prévalait avant la grève.

[2] Le Conseil a décidé d’accueillir en partie la plainte pour les motifs exposés ci-après.

II. Contexte

[3] Le syndicat et l’employeur ont entamé des négociations collectives en vue du renouvellement de leurs conventions collectives visant le personnel itinérant, lesquelles ont expiré le 31 décembre 2014. Le processus de conciliation et de médiation n’ayant donné aucun résultat, le syndicat a donné un avis de grève à l’employeur le 10 février 2015 précisant qu’il déclencherait une grève le 15 février 2015, date à laquelle les employés obtenaient leur droit de grève; la grève a effectivement commencé à cette date. Le 16 février, les parties ont conclu une entente en vue de mettre fin à l’arrêt de travail et de soumettre à l’arbitrage exécutoire leur différend découlant des négociations collectives, conformément à l’article 79 du Code. Le même jour, elles ont aussi convenu d’un protocole de retour au travail (PRAT) établissant les modalités selon lesquelles les employés retourneraient au travail le lendemain.

[4] Tout juste avant le début de la grève, les congés pour affaires syndicales étaient régis par les modalités d’une entente provisoire conclue par les parties dans le contexte d’une plainte de pratique déloyale de travail instruite par le Conseil en avril et en août 2014. Le Conseil a conclu en dernière analyse à une violation du Code et a imposé cette entente aux parties au moyen de l’ordonnance no 738-NB (voir Compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique, 2015 CCRI 775). Cette ordonnance devait demeurer en vigueur jusqu’à la première des éventualités suivantes, soit jusqu’à ce que les parties concluent une nouvelle convention collective ou jusqu’à ce que les conditions prévues aux alinéas 89(1)a) à e) du Code aient été remplies. En rendant cette ordonnance, le Conseil a en fait imposé la question des congés pour affaires syndicales à la table de négociation. Les parties ne sont toutefois pas parvenues à une entente sur cette question durant les négociations collectives.

[5] Après que les parties eurent convenu de soumettre leurs questions non réglées à la procédure d’arbitrage aux termes de l’article 79, les employés sont retournés au travail le 17 février 2015 conformément au PRAT conclu par le syndicat et l’employeur. Le 20 février 2015, dans une lettre adressée au syndicat, l’employeur précisait que, à son avis, l’ordonnance du Conseil no 738‑NB avait expiré et qu’il apportait des changements aux règles concernant l’octroi de congés pour affaires syndicales. Dans sa réponse datée du 22 février 2015, le syndicat a accusé l’employeur de ne pas respecter l’entente visant à mettre fin à l’arrêt de travail et le PRAT connexe.

[6] C’est ce qui a donné lieu au dépôt de la présente plainte de pratique déloyale de travail (plainte de PDT). Le syndicat a simultanément présenté une demande d’ordonnance provisoire sollicitant l’intervention immédiate du Conseil pour régler la question des congés pour affaires syndicales.

[7] La demande d’ordonnance provisoire a été traitée selon la procédure expéditive, conformément au Règlement de 2012 sur le Conseil canadien des relations industrielles. Le Conseil a tenu une audience par téléconférence le 5 mars 2015 et a rendu une ordonnance provisoire enjoignant à l’employeur de respecter les modalités des paragraphes 1 et 2 de l’entente provisoire que le Conseil avait imposée dans son ordonnance no 738‑NB.

[8] Pendant la téléconférence du 5 mars 2015, le Conseil a aussi demandé aux parties de se consulter mutuellement et de lui fournir des dates en vue de la tenue éventuelle d’une audience sur le bien‑fondé de la plainte de PDT. Lorsqu’il a délivré son ordonnance provisoire le même jour, le Conseil a réitéré sa requête pour que les parties lui fournissent des dates.

[9] Au moment où a eu lieu l’audience relative à la demande d’ordonnance provisoire, les parties n’avaient pas fourni au Conseil leurs observations écrites sur le bien‑fondé de la plainte puisque le délai pour présenter la réponse et la réplique n’avait pas encore expiré. L’employeur a fourni sa réponse à la plainte le 12 mars 2015, et le syndicat a présenté sa réplique le 23 mars 2015. 

[10] Les parties ont aussi fait part de leur disponibilité en vue d’une audience dans des lettres datées du 19 et du 23 mars. Le Conseil n’a toutefois pas confirmé de date pour l’audience ni envoyé d’avis d’audience concernant le bien‑fondé de la plainte de PDT.

[11] Après avoir examiné les observations complètes des parties, le Conseil a conclu qu’il n’était pas nécessaire de tenir une audience. Le 5 juin 2015, il a informé les parties qu’il rendrait sa décision en se fondant sur les documents versés au dossier et qu’il n’était plus nécessaire de retenir les dates qu’elles avaient réservées en vue d’une audience.

III. La décision de ne pas tenir une audience

[12] Après que le Conseil eut informé les parties qu’il ne tiendrait pas d’audience et qu’il rendrait sa décision en se fondant sur leurs observations écrites, l’employeur a écrit au Conseil, remettant en question la décision de celui‑ci de ne pas tenir d’audience après avoir demandé aux parties de lui fournir des dates. Il a aussi demandé au Conseil de ne pas prévoir d’audience pour l’instant puisque les parties devaient comparaître devant le juge George W. Adams, le médiateur‑arbitre nommé par la ministre du Travail afin de régler la question de la convention collective.

[13] Il est bien établi que le Conseil peut rendre une décision fondée sur les documents versés au dossier. L’article 16.1 du Code prévoit clairement que le Conseil peut trancher toute affaire ou question dont il est saisi sans tenir d’audience. En sa qualité de tribunal administratif, le Conseil est maître de sa procédure; il détermine, relativement à chaque affaire, si une question particulière nécessite la tenue d’une audience ou si les documents versés au dossier suffisent pour trancher l’affaire. Le pouvoir du Conseil de rendre une décision en s’appuyant seulement sur les documents qui lui ont été soumis a été confirmé dans l’arrêt NAV CANADA, 2000 CCRI 468, confirmé dans NAV Canada c. Fraternité internationale des ouvriers en électricité, 2001 CAF 30.

[14] En l’espèce, le Conseil a effectivement demandé aux parties de lui fournir des dates en vue de la tenue d’une audience au cas où il serait nécessaire d’entendre d’autres témoignages ou arguments. En raison du nombre d’affaires dont il est actuellement saisi mettant en cause les mêmes parties, le Conseil a jugé prudent de prévoir des dates le plus tôt possible afin d’éviter de retarder inutilement l’affaire. Cependant, après avoir reçu et examiné toutes les observations détaillées des parties, le Conseil a conclu qu’il n’était pas nécessaire de tenir une audience. Le Conseil a donc exercé son pouvoir discrétionnaire, prévu à l’article 16.1 du Code, de trancher la présente affaire sans tenir d’audience. 

IV. Bien-fondé de la plainte

A. Position des parties

1. Le syndicat

[15] La CFTC affirme qu’elle a accepté de soumettre à la procédure d’arbitrage le différend qui opposait les parties dans le contexte des négociations collectives, pour autant que les parties retournent aux modalités et aux conditions d’emploi qui étaient en vigueur avant le début de la grève. Elle prétend que cette entente avait pour effet de rétablir le gel prévu au Code, notamment les modalités de l’entente provisoire prolongée par l’ordonnance du Conseil datée du 7 août 2014, et que le statu quo devait être maintenu jusqu’à la fin de la procédure d’arbitrage. Par conséquent, elle allègue que l’employeur a enfreint l’article 50 du Code

[16] Elle prétend aussi que, en modifiant unilatéralement les modalités et les conditions d’emploi, l’employeur a enfreint l’entente de principe et le PRAT et que ces modifications sont assimilables à un lock‑out, qui est interdit par l’entente conclue aux termes de l’article 79 du Code

[17] Le syndicat allègue que, en raison de la nouvelle politique de l’entreprise, les congés pour affaires syndicales qui avaient été approuvés avant la grève ont été annulés, ou que les nouvelles demandes de congé ont été refusées, ce qui nuit à sa capacité de représenter ses membres ou plus généralement constitue de l’ingérence dans l’administration du syndicat, en violation de l’alinéa 94(1)a) du Code.

[18] Elle demande au Conseil d’ordonner à l’employeur de cesser d’enfreindre le Code et l’entente conclue entre les parties aux termes de l’article 79 ainsi que le protocole de retour au travail.

2.  L’employeur

[19] L’employeur estime que l’ordonnance du Conseil a expiré lorsque le syndicat a déclenché sa grève. Il se fonde sur le libellé de l’ordonnance du Conseil et sur la correspondance de celui-ci pour faire valoir que l’intention du Conseil était de faire en sorte que les parties discutent de la question des congés pour affaires syndicales à la table de négociation. De l’avis de l’employeur, le Conseil a indiqué clairement que l’ordonnance devait expirer à la première des éventualités suivantes, soit la conclusion d’une nouvelle convention collective ou l’acquisition du droit de grève ou de lock‑out.

[20] L’employeur soutient que, étant donné que l’entente provisoire sur les congés pour affaires syndicales avait pris fin, il a mis en œuvre une nouvelle politique qui n’enfreignait pas la convention collective. L’employeur affirme qu’il a le droit de gérer les congés pour affaires syndicales et que le syndicat refuse d’accepter tout changement aux pratiques qui étaient en place. À l’appui ce cette affirmation, l’employeur fait un survol des vastes discussions que les parties ont eues sur cette question durant les négociations collectives.

[21] Selon l’employeur, il y a un simple désaccord entre les parties quant à la nature de l’ordonnance du Conseil no 738‑NB qui prolongeait l’application de l’entente provisoire des parties concernant les congés pour affaires syndicales. Il soutient que le PRAT avait pour objet de prévoir le retour au travail des employés en fonction des modalités et des conditions particulières qui régissent leur emploi. Cependant, à son avis, le PRAT n’avait pas pour effet de prolonger l’application des modalités d’ententes visées par une date précise qui avaient pris fin et que les parties n’avaient pas le pouvoir de modifier. L’employeur se fonde sur la décision Aliant Telecom Inc., 2003 CCRI 237, pour affirmer que l’ordonnance du Conseil no 738-NB était assortie d’une date de fin précise qui a été appliquée lorsque les parties ont acquis le droit de grève et de lock‑out. 

[22] L’employeur reconnaît qu’il a annoncé la mise en œuvre d’une nouvelle politique sur les congés pour affaires syndicales le 20 février 2015. Il nie toutefois toute allégation selon laquelle il a enfreint le Code, et il affirme en fait que les mesures qu’il a prises cadrent avec ses obligations juridiques. Il donne plusieurs exemples de situation où des congés ont été accordés, et il fait valoir que, selon la loi, il a le droit et l’obligation de gérer les congés pour affaires syndicales et souligne que tous les efforts qu’il a déployés en ce sens ont suscité une réponse négative de la part du syndicat.

V. Analyse et décision

[23] Lorsque les parties à un différend découlant des négociations collectives parviennent à une entente aux termes de l’article 79 du Code en vue de soumettre à l’arbitrage toutes les questions demeurées en litige afin de régler de façon définitive la convention collective, cette entente met fin au différend et les parties ne sont plus en mesure de recourir à une grève ou à un lock‑out comme méthode de règlement du différend. L’article 79 du Code est ainsi libellé :

79. (1) Par dérogation aux autres dispositions de la présente partie, l’employeur et l’agent négociateur peuvent convenir par écrit, notamment dans une convention collective, de soumettre toute question liée au renouvellement ou à la révision d’une convention collective, ou à la conclusion d’une nouvelle convention collective à une personne ou un organisme pour décision définitive et exécutoire.

(2) L’entente suspend le droit de grève ou de lock-out et constitue l’engagement de mettre en oeuvre la décision.

[24] Une entente conclue aux termes de l’article 79 a pour effet de clore les négociations d’une convention collective et de mettre fin à l’obligation de négocier des parties puisque celles‑ci acceptent d’être liées par la décision de l’arbitre. Comme il a été mentionné dans Sécurité Kolossal inc., 2004 CCRI 292 :

[31] À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime qu’à partir du moment où des parties sont engagées dans un processus d’arbitrage exécutoire en vertu de l’article 79 du Code, après l’expiration de la convention collective initiale, il n’est plus possible de considérer qu’il n’y a pas de convention collective applicable à l’unité de négociation et que cette période demeure ouverte pour un syndicat maraudeur. Dans un tel cas, les conditions d’emploi restent à être déterminées par l’arbitre, mais les parties se sont engagées au sens du paragraphe 79(2) du Code à « mettre en oeuvre la décision » de l’arbitre. Cet engagement démontre l’intention des parties de mettre un terme à l’obligation de négocier.

[25] À toutes fins et intentions, l’entente conclue aux termes de l’article 79 équivaut à la conclusion d’une nouvelle convention collective, et les parties sont maintenant liées par les modalités de cette nouvelle entente même si certaines modalités de celle-ci ne seront établies que par la mise en oeuvre de la décision arbitrale. L’article 79 du Code a un effet prospectif et ne peut être interprété de manière à ce que la disposition relative au gel prévue à l’alinéa 50b) du Code telle qu’elle était avant que les parties obtiennent le droit de grève ou de lock‑out soit rétablie lorsque les parties acceptent de soumettre les questions non réglées à l’arbitrage exécutoire.

[26] Pendant que les modalités non réglées de la convention collective font l’objet d’un processus de médiation-arbitrage, les parties ne peuvent pas modifier unilatéralement les modalités et conditions en vigueur. Les parties continuent d’être liées par les modalités et les conditions de l’ancienne convention collective jusqu’à ce que celle-ci soit révisée par la décision de l’arbitre. Dans certaines affaires, il n’est pas rare que les parties incluent des éléments déjà convenus durant le processus de négociation collective, ou il arrive qu’elles acceptent de mettre en oeuvre des modalités différentes, mais elles le font d’un commun accord.

[27] En l’espèce, les parties se sont expressément entendues pour revenir aux modalités et aux conditions qui étaient en place avant le déclenchement de la grève. Le PRAT dit entre autres ceci :

ATTENDU QU’une grève légale a été déclenchée chez CP Rail le 15 février 2015;

ET ATTENDU QUE l’entreprise et le syndicat souhaitent adopter des règles pour rétablir des relations de travail normales;

ET ATTENDU QUE l’entreprise et le syndicat souhaitent adopter des règles pour rétablir un retour au travail ordonné;

EN conséquence, les parties conviennent de ce qui suit :

...

4. Tous les membres des unités de négociation devront retourner au travail selon les mêmes modalités et conditions qui s’appliquaient à chaque membre respectivement avant le déclenchement de la grève.

(traduction; c’est nous qui soulignons)

[28] Les modalités et les conditions qui existaient et s’appliquaient aux membres des unités de négociation lorsque le syndicat a décidé d’exercer son droit de grève englobaient les modalités contenues dans l’entente provisoire conclue entre les parties et prolongée par l’ordonnance du Conseil no 738‑NB. Étant donné que les parties ne se sont pas entendues sur des modalités différentes concernant les congés pour affaires syndicales, l’employeur ne peut modifier unilatéralement ces modalités, comme il lui était interdit de le faire avant que les parties acquièrent le droit de grève ou de lock‑out.

[29] Selon l’employeur, le syndicat savait que l’entente provisoire sur les congés pour affaires syndicales imposée par l’ordonnance du Conseil était arrivée à échéance lorsqu’il a choisi de déclencher la grève. Cependant, on peut en dire autant des modalités et des conditions contenues dans la convention collective. Pourtant, lorsque les parties ont convenu de mettre fin au différend et de soumettre toutes les questions non réglées à un médiateur‑arbitre, elles ont accepté de revenir aux modalités et aux conditions qui étaient en place avant le déclenchement de la grève même si, sur le plan technique, la convention collective avait expiré et ne liait plus les parties lorsque le syndicat a exercé son droit de grève. Les modalités et les conditions contenues dans la convention collective n’étaient plus protégées durant la grève, et les dispositions de l’entente provisoire conclues entre les parties ne l’étaient pas non plus.

[30] L’employeur ne peut, dans cette situation, choisir les modalités qu’il lui convient de continuer d’appliquer pendant cette période jusqu’à ce que l’arbitre établisse de façon définitive la nouvelle convention collective. Lorsque les parties ont accepté de mettre fin au différend et de soumettre les questions non réglées à l’arbitre, elles ont aussi accepté d’être liées par les modalités et les conditions qui existaient avant la grève, quelle que soit la façon dont elles ont été mises en place. Le PRAT ne permet à aucune des parties de modifier unilatéralement l’une ou l’autre de ces modalités et conditions. 

[31] L’ordonnance a été rendue au départ parce que le Conseil a jugé que l’employeur avait manqué aux obligations que lui impose le Code en cherchant à modifier unilatéralement les pratiques de longue date liées à l’octroi de congés pour affaires syndicales. Lorsque les parties ont convenu de mettre fin au différend qui les opposait dans le contexte des négociations collectives, elles se sont entendues pour revenir au statu quo jusqu’à ce que toutes les questions non réglées, y compris la question des congés pour affaires syndicales, soient tranchées par l’arbitre. L’employeur ne peut pas modifier unilatéralement les modalités régissant les congés pour affaires syndicales ni les autres modalités et conditions d’emploi en place actuellement pendant que s’achève la procédure d’arbitrage.

[32] Le fait d’accepter la proposition de l’employeur reviendrait à accepter que tout ce qui n’a pas été réglé durant les négociations collectives peut être modifié unilatéralement par l’employeur durant le processus de médiation‑arbitrage convenu aux termes de l’article 79. Le Conseil ne peut accepter cette proposition puisque ce n’est pas l’effet voulu de l’article 79. Même si les modalités qui régissent les congés pour affaires syndicales ne faisaient pas toutes parties de la convention collective existante, le Conseil a conclu dans des instances antérieures que les ententes et pratiques locales qui régissent collectivement les congés pour affaires syndicales ne pouvaient être modifiées unilatéralement. L’intention du Conseil était de faire en sorte que les parties négocient et s’entendent sur de nouvelles dispositions concernant les congés pour remplacer les dispositions en place avant la conclusion de l’entente provisoire en avril 2014. Dans l’intervalle, il a ordonné aux parties de respecter une entente qu’elles ont elles‑mêmes négociée en guise de mesure provisoire.

[33] Le Conseil comprend que l’employeur cherche à apporter des changements à la façon dont il mène ses activités. Toutefois, l’employeur doit aussi respecter le fait que ses employés sont représentés par un agent négociateur et qu’il ne peut pas modifier unilatéralement les modalités et les conditions d’emploi, y compris les dispositions liées aux congés pour affaires syndicales, sans l’accord de l’agent négociateur tout au long du processus de négociation collective.

[34] En l’espèce, l’employeur a communiqué une nouvelle politique concernant les congés pour affaires syndicales sans tenir compte des modalités et des conditions en place qui découlaient de l’entente conclue aux termes de l’article 79 et du PRAT. Le Conseil conclut que la lettre envoyée par l’employeur le 23 février 2015, dans laquelle il impose unilatéralement de nouvelles conditions relativement à la demande et à l’octroi des congés pour affaires syndicales, enfreint l’alinéa 94(1)a) du Code puisqu’elle ne tient pas compte des droits et des obligations de l’agent négociateur au regard de la représentation des employés en ce qui concerne d’importantes modalités et conditions d’emploi.

[35] Les modalités exposées dans l’entente provisoire, dont une copie est jointe à l’ordonnance du Conseil no 738-NB, doivent continuer de s’appliquer à partir de la date de la présente décision jusqu’à ce que les parties conviennent d’un commun accord de modalités différentes concernant les congés pour affaires syndicales ou jusqu’à ce que l’arbitre impose des modalités différentes à cet égard. Le Conseil joint à la présente décision une ordonnance en ce sens, laquelle remplace l’ordonnance provisoire no 754‑NB qu’il a rendue le 5 mars 2015.

[36] En raison de cette conclusion à l’égard de la plainte déposée en vertu de l’alinéa 94(1)a), le Conseil conclut qu’il est inutile de traiter les autres présumées violations du Code et qu’aucun objectif valable en matière de relations du travail ne le justifie.

[37] Il s’agit d’une décision unanime du Conseil.

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